30 Avril 2020
Au creux du confinement, accueillons le langage du … S I L E N C E !
Dans ce temps de retrait, de solitude, d’isolement, de repli sur soi, de farniente, de manque d’activités, de relations, de bruits intérieurs (peut-être), etc., il y a un mot qui résonne ces jours-ci en langage bruyant, au cœur de la maison paroissiale d' Airvault : c’est le mot S I L E N C E. Eh oui ! Quel paradoxe !!! Alors, au cœur de mon ermitage, j’ai décidé de me confier aux petites touches magiques de mon ordinateur, de vous livrer en silence … le secret du
S I L EN C E.
Tout d’abord, le S I L E N C E n’est pas uniquement l’hôte des carmels, des monastères ou le compagnon exclusif des ermites ou des contemplatifs ou le souffre-douleur des solitaires ou de ceux et celles qui vivent la situation d’aujourd’hui dans l’isolement, la peur, la détresse, l’ennui. Il est important de découvrir et de comprendre que le S I L E N C E peut effectivement avoir deux visages : celui de la grâce ou celui d’une impasse. Car, nous le savons, pour l’avoir maintes et maintes fois expérimenté, il y a des silences qui ouvrent le cœur et l’esprit, et d’autres qui ferment les poings des deux mains.
Il est, en effet, des silences « à mains ouvertes » et c’est alors une grâce, et il est des silences « à poings fermés » et c’est alors une impasse.
Silence à poings fermés que ces temps que nous pouvons subir en les occupant à des futilités pour passer le temps, comme on dit, ou pour tuer le temps.
Silence à mains ouvertes que peuvent être ces mises en disponibilité forcées de notre être, pour savourer le temps et non le laisser couler, pour bricoler, lire, écrire, prier, méditer.
Silence à poings fermés que ces temps où nous sommes, à ce point, préoccupés de nous-mêmes, parce que nous sommes emmurés, devenant aigris, acariâtres, exigeants.
Silence à mains ouvertes quand nous osons accueillir ce temps de silence, de réflexion, de partage, l’accueillir humblement comme une grâce, pour mieux percevoir tout ce qui nous est demandé de vivre aujourd’hui et accueillir tout ce qui nous est offert au plus intime de nous-mêmes.
Oui, le véritable S I L E N C E est une grâce qui, comme toute grâce, ne s’impose ni par quelque intervention extérieure, ni à la force des poignets. Une grâce qui se reçoit comme un cadeau !
Le S I L E N C E, il s’agit pour nous, non pas de le « faire », mais de l’accueillir.
OUI mon frère, ma sœur, l’accueillir et nous laisser guider par lui, car il est aussi plein de sagesse et d’esprit que le marbre non taillé est riche de sculpture. En effet, le marbre s’offre au sculpteur pour prendre forme et donner vie ; eh bien, le S I L E N C E s’offre à l’homme pour le conduire à l’essentiel et donner un idéal à sa vie et un objectif à son confinement.
Pour moi, le S I L E N C E est une source d’amour, un puits d’émerveillement, un chemin de paix, de réconciliation, la rencontre, ma rencontre avec Celui qui m’a appelé dans cette vie consacrée.
Le S I L E N C E me permet de mieux entendre la voix du Seigneur et de me laisser sculpter par lui.
Le S I L E N C E est une lumière dans mon « capharnaüm intérieur ». Il me permet, sans prétention, de discerner ce qui est bon de ce qui est mauvais dans mon existence. Il me suffit, pour cela, d’emprunter le chemin des poètes, le sentier des bergers, la passerelle des contemplatifs, non pour m’isoler et vivre dans mon petit loft de confinement, mais me laisser apprivoiser et guider par ce compagnon discret mais efficace. Car si le silence me conduit à l’essentiel, c’est pour me rendre plus présent au cœur de ce pèlerinage terrestre et pour mieux me réaliser dans ma vocation baptismale.
Le S I L E N C E est un livre où DIEU écrit le chemin de l’homme, mon chemin. Est-ce que je sais prendre du temps pour lire ce livre et découvrir l’histoire de ma vocation ?
Si je me permets de livrer ces quelques pensées peut-être « bruyantes » sur le S I L E N C E, c’est qu’il a frappé d’une manière particulière à la porte de mon cœur, pendant ce temps de désert ou plutôt il m’a fait comprendre que je devrais prendre plus de temps avec lui...même si j'avais l’impression d’être son fidèle compagnon, car lui veut me montrer qu’on n’est jamais seul dans cette aventure terrestre.
OUI mon frère, ma sœur, n’hésitons pas à nous laisser apprivoiser, « contaminer » par ce bon serviteur de notre vie chrétienne qui veut nous conduire, loin des bruits et des sunlights, pour nous aider à nous désencombrer de toutes nos installations : installés que nous pouvons être dans nos petites habitudes, nos petites certitudes, nos petites vertus, notre petit train-train, nos petites indifférences….
Le S I L E N C E est un chemin de désinstallation sur lequel il importe de se laisser conduire, de se laisser inviter, de se laisser guider.
Je te souhaite de prendre le temps et ce temps nous tend les bras actuellement, pour rencontrer le beau S I L E N C E qui habite ton cœur et qui souhaite faire route avec toi, avec nous, pour nous faire sortir du confinement dans lequel nous sommes peut-être enfermés depuis très longtemps … et peut-être sans le savoir. Nous sommes tellement sollicités par les écrans et le monde extérieur qu’il nous est difficile d’habiter notre cœur, source et sommet de notre destinée.
Le S I L E N C E, vous l’avez compris, n’est donc pas tant l’absence de paroles qu’une présence amoureuse au mystère, une communion à ce qu’il y a de plus sacré, de plus profond en nous.
Laissons résonner dans notre cœur cette phrase d’une hymne : « En toute vie, le silence dit Dieu ».
Bon compagnonnage avec S I L E N C E, pour mieux goûter et vivre l’Essentiel. Dans le confinement est tapie la solitude … mais il y a également S I L E N C E qui t’attend, prêt à t’accueillir pour faire de toi, de moi, un témoin d'Amour, un messager de paix, un missionnaire d’Évangile et pour donner à la solitude un autre visage que celui de la morosité et de l’ennui.
Une petite voie sans voix… CHUT !!!
P. Jacques Poidevineau
(1) : membre de l'UAC depuis une dizaine d'années, le père Jacques Poidevineau exerce sur une paroisse rurale du diocèse de Poitiers. Il participe également à la pastorale de l’hôpital de Thouars et dans le milieu du handicap.
D'abord éducateur, il est entré au séminaire diocésain de Poitiers. Au cours de ses 30 ans de ministère, il a gardé ce sens poétique qui lui fait rédiger une lettre hebdomadaire, depuis le début du confinement.
Union Apostolique du Clergé (UAC) / www.uac.fr
Revue Prêtres Diocésains / www.pretres-diocesains.fr
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